Ich bin ein Hamburger

Ça y est, c’est décidé, je vais apprendre l’allemand.

Toi lecteur qui parcourt ces lignes, cette résolution va peut-être te paraître anecdotique, pour moi elle est un pas de géant dans le processus d’adaptation en pays étranger.

L’apprentissage de la langue d’un pays à visiter a toujours été un de mes exercices préféré. Petite en train-couchette vers Venise, une femme m’apprenait à compter en italien – avant que sa vieille mère se mette à ronfler comme un sanglier le reste de la nuit durant ; j’ai maté l’intégral de Friends sans les sous-titres au boulot pendant mes quatre mois de vie à Londres – je rentrais bilingue ; et je tombais amoureuse d’à peu près chaque nom de rue ou d’aliment dans mes déambulations Athéniennes – malheureusement ça n’a pas suffit à apprendre le grec. Mais quand je rencontrais à Rome un portugais qui me promettait l’Allemagne tout en me parlant en anglais, j’était tout à coup plus confuse. Comme toute personne saine d’esprit ayant choisi espagnol en seconde langue du collège à la fin de mes études supérieures, l’allemand n’avait jamais fait partie de la liste de mes destinations rêvées. L’ironie du sort s’est bien foutue de moi, et me voilà valises posées au pays de Goethe, Bach et de l’incontournable curry wurst. 

Il aura fallu un certain temps avant de comprendre qu’apprendre l’allemand n’allait pas être une option pour moi. Je suis auteure en quête d’histoires et de rencontres – accessoirement de travail – j’aime un trilingue dont je ne maîtrise pas deux langues sur trois, et même mes colocataires – dont un français ! – se plaisent à échanger en charabia germanique toute la sainte journée. La cerise sur le gâteau : les allemands ne sont pas spécialement ce que j’appellerais une civilisation chaleureuse et accueillante – oui, je fais une généralité, pardonnez-moi – donc parler anglais ou français, même avec un grand sourire, me vaut souvent des regards noirs, ou vides. En tant que parisienne, je n’avais jamais été confrontée à une population capable d’être autant voire plus ronchonne et désagréable que la mienne. Une grande découverte, et je ne le cache pas, un premier point commun.

Un autre aspect concernant l’apprentissage de la langue : n’attendez aucun soutien de la part de vos pairs français. « Ah tu vas apprendre l’allemand ? Moi j’en ai fait pendant douze ans à l’école et je ne sais dire que karttofel – ni plus ni moins que : pomme de terre » ou encore « Oui, le problème de l’allemand c’est qu’il faut à la fois la grammaire, le vocabulaire, et l’accent. Absolument rien à voir avec tout ce que tu connais. ». Vous comprenez pourquoi je trainais du pied. 

Et puis j’ai commencé à me dénouer des préjugés. À force d’écouter les conversations je comprenais certains contextes, j’apprenais quelques mots. Je remarquais que les allemands disent souvent sorry et merci. Que depuis petite je dis moi-même souvent Tschüss à force d’entendre mon amie d’enfance Mina le dire à sa mère au téléphone. Finalement, que nos mots se mélangeaient plus qu’on ne le croit. Je me disais, plutôt que d’y aller avec de la mauvaise volonté, pourquoi ne pas en profiter pour m’exercer à traduire des poèmes ? Lire enfin Nietzsche ? Utiliser cet abonnement Babbel que j’ai déjà payé ? Creuser ma propre voix dans la langue par le biais de la littérature et de ses arts, en voilà une idée. Après tout, si ARTE existe bien, pour les heures que je lui ai consacré toutes ces années, je pourrais faire un effort. Je suis de nature optimiste, mais on ne survis pas longtemps dans une ville en ne sachant dire qu’Ich liebe dich.

Teto Maltesi

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