Bando alle ciance, veut dire assez parlé

Parfois on pense qu’on va simplement enlever son pyjama, faire sa valise et partir en direction de la gare pour 4 jours de vacances dans les montagnes, et puis on se retrouve au milieu d’un fist fight sur la ligne 14. 

C’est l’image du mois d’octobre. Se prendre des pains quand on ne s’y attend pas. Un bon crochet du gauche qui rebondit sur la joue molle d’un type en faisant un bruit de vaisselle cassée. Brutal. Avoir le souffle coupé sous le choc, vider ses poumons d’air avant de les remplir de lave, bouillir de rage, aveuglé. Voir dans le regard du type l’envie de sauter à la gorge de l’autre et de le mettre en charpie, sous le tunnel le plus long entre Châtelet et gare de Lyon. Putain, allez, quand est-ce qu’on arrive. Se demander si on va prendre une balle perdue, si une dizaine de personnes suffiront à retenir les fauves qui aboient et grognent. Entendre une voix crier « je vais appeler la police ! » mais vraiment personne n’en a rien à foutre. Au fond, la rame était excitée. Une seconde, on voulait voir du sang. Ils avaient tous la bave aux lèvres. Et puis, voir les néons s’allumer, le quai apparaître, se lever et sortir en vérifiant qu’on a rien oublié, laissant la scène en suspend. Prendre le train. S’éloigner.

Philip Guston

Voiture 7, place 63 et 64. Le deuxième mousquetaire se pointe. Pendant trois heures, Tony me raconte les tableaux qu’il a restauré, partout dans le monde. Beaucoup en Italie. Même des Modigliani, dont il me raconte l’histoire de La petite fille en bleu, offerte par l’artiste en paiement d’un loyer à son propriétaire. Moi je me ferais envoyer chier si j’offrais de payer en mots, pourtant je pourrais en donner bien plus que 900 par mois. Tony me demande quel artiste je copierais. Je réponds un Alice Neel pour moi, un Turner si c’est pour offrir. Je lui demande quel est le plus grand tableau sur lequel il ait jamais travaillé. Il me répond : 

– La Joconde. Je l’ai bichonnée. 

Il me demande ce que j’écris si vite comme ça dans mon carnet, pourquoi j’ai fait une pause, pourquoi j’ai recommencé à écrire après qu’il m’ait posé la question. Si je parle de lui. Je lui dit que j’écris beaucoup dans les trains, qu’il faut que j’en profite pour tout sortir, ça n’arrive pas si souvent. En regardant dehors les vallons défiler les couleurs de l’automne sont comme les spots sur la scène d’un concert et les feuilles volantes sous la pluie comme des pétales de rose qu’on se jette sur la tête les yeux pleins de larmes. Je n’avais pas envie que ça s’arrête. 

– Te dire ce que j’écris ce serait trop long à expliquer, je réponds à Tony. Parce qu’on écrit dans le désordre et un peu au hasard en l’ayant toujours sur le bout de la langue, que c’est un peu comme faire une pizza à la poêle, que c’est comme Clément me raconte autour d’un verre de vin, un soir de semaine, ce sentiment d’acheter des livres qu’on meurt d’envie de lire mais qu’on regarde en se voyant les lire et les aimer, sachant qu’ils vont nous changer, n’osant plus les toucher de peur d’éclater l’idée trop belle. C’est apprendre à céder. Ne plus chercher à comprendre, à répondre à tout. C’est Philip Guston qui me l’a appris, d’ailleurs, j’ai enfin vu ses oeuvres et j’étais insatiable. Les peintres et les restaurateurs ont beaucoup à apprendre aux écrivains. Notre éternel dilemme : est-ce suffisant d’être un témoin ? Avant d’être des feuillets collés les uns aux autres à la Proust les récits sont des listes. Comme celle d’une inconnue que j’ai retrouvé dans la poche arrière d’un vieux jean. Ce sont des pages de carnets arrachées puis glissées dans un autre, ayant pour titre celui d’un article relevé dans Libé : « Le chaos que nous vivons est le résultat d’une attention perdue ». À cette ligne en gras répondrait celle répétée en boucle d’une chanson « Heaven  is a place where nothing ever happens » où Heaven est en réalité un bar, suivi de cette anecdote que tu m’as dite, Tony, tu te rappelles, quand tu m’as raconté qu’une nuit tu avais dormi à la belle étoile et que tu avais attrapé un coup de lune. Moi, pendant ce temps, je regardais un homme promener son chien mais c’est lui qui levait la patte. Et pourquoi c’est si facile de lire des livres empruntés à la bibliothèque et pas ceux qu’on achète ? Ce qui n’est pas si facile, c’est de se concentrer sur l’écriture quand les hommes que je vois par la fenêtre de leur voiture sur la nationale se curent tous le nez. Attends, il ne faut pas que je perde le fil. Je cherchais un mot dans un texte que je devais écrire et pour lequel j’étais payée. Je n’arrivais pas à le trouver ça me rendait complètement dingue. Le mot était : indisciplinée. Tu me demandes ce que j’écrivais, j’ai noté cette citation d’une autrice mais je ne sais plus qui l’a dite pourtant je suis d’accord avec elle : I decided when I went to school never to be and author never to try to write a book because I was so sure I couldn’t do it. Je t’avais dit que ce serait long à expliquer, ça demande toujours de remonter loin, très loin, d’expliquer ce qu’on crée.

Bando alle ciance, me dit Tony, veut dire assez parlé maintenant. Il est temps de s’y mettre.

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