Danser la vie – avec L’Anasonge

Mesdames messieurs, bonjour ! Je suis ravie de vous retrouver aujourd’hui pour un nouvel article du projet Rencontres, qui, je l’espère, vous inspirera et provoquera quantité de beaux et nouveaux questionnements en vous.

J’ai échangé quelques mots avec Lana, de la chaîne Youtube L’Anasonge. J’avais envie d’aborder une autre facette du projet, de développer davantage le discours, la réflexion et la culture pour cet article. Je trouve que Lana fait preuve d’une grande introspection sur elle, ce qu’elle aime faire chaque jour et ce qui stimule sa créativité dans ces contenus. Un grand nombre de ses vidéos laissent libre court à ses pensées, parfois sur des sujets qui nous concernent en tant que jeune adulte ou artiste en devenir. D’autres sont des expériences créatives et nous donne envie, nous aussi, d’écouter notre cœur et de nous jeter à l’eau. Pour tout ce partage, je trouvais bien de lui laisser carte blanche sur ses réponses à mes questions.

Je préfère vous prévenir, cet article risque d’être assez long. Alors prenez vous un bon thé, allongez-vous tranquillement dans votre canapé comme pour lire un bon bouquin et laissez-vous porter. Je vous souhaite une excellente découverte.

***

PEPPER : Bonjour Lana ! Pourrais-tu te présenter brièvement ?

LANA : Bonjour ! Je suis une toute jeune femme de 20 ans qui essaie de vivre ses débuts de vie de jeune adulte, période charnière & très déstabilisante je dirai, dans une perspective de compréhension, de partage, de sérénité et de confiance. Je suis passionnée par la création artistique et petit à petit je me laisse porter par la réalisation de mes rêves en me frayant un chemin dans cette voix à travers la vidéo, la peinture, l’illustration (le chant et la danse aussi, davantage à titre personnel).

Comment expliquerais-tu ce que tu fais à quelqu’un qui n’en aurait jamais entendu parler ?

Je réalise, avant toute chose, des vidéos sur YouTube. C’est de là que tout a commencé. Il y a de ça un peu plus d’un an j’ai repris cette activité que je réalisais assez innocemment plus jeune, sans trop me rendre compte de la portée que cela avait chez moi. J’avais ce rêve d’en faire mon activité, que je n’osais cependant trop m’avouer étant donné mon jeune âge. En bref j’ai arrêté alors que cela semblait plutôt bien fonctionner.

C’est en 2018 que j’y ai repensé, et que je me suis dis « tiens, je me sentais quand même vachement bien là-dedans, il y a peut-être quelque chose à y faire ! ». Depuis, j’explore et je m’explore à travers cette passion, à laquelle s’ajoutent à présent d’autres ambitions en lien avec mon attrait pour la peinture et le dessin. Au fur et à mesure que je m’y consacre, je cerne ce qui me plaît et ce qui me plaît moins, et de là se tisse un univers que je dirai en expansion !

Je réalise différents formats, les deux majeurs et ceux dans lesquels je m’amuse le plus :

  • Les vlogs, vidéos organisées autour d’un moment de vie filmé et mis en scène, qui laissent donc toute une liberté pour la création artistique.
  • Les formats parlés où je partage des expériences personnelles et des cheminements de pensées dans une volonté de partage, de « démocratisation » de phénomènes se rattachant à la vie intérieure humaine et psychologique dont on ne parle pas assez voire pas vraiment parfois, tout cela dans une sphère bienveillante, d’entre-aide et de partage.

Peux-tu me parler un peu plus en profondeur de ta présence sur Youtube ? Qu’est-ce qui t’attire dans la création de contenu ?

Deux choses : le partage et l’expression de soi par un biais artistique.

Ce qui est assez marquant en fait, c’est que j’ai grandi en même temps que la plateforme YouTube. C’est une plateforme qui m’a accompagnée pendant toute mon adolescence et à présent dans ma vie de jeune adulte. C’est drôle de se dire ça mais en fait, je prends conscience de l’importance qu’a eu cette plateforme dans ma vie. Avant d’être une personne qui réalise des vidéos sur YouTube, je suis avant tout quelqu’un qui s’est construit tout un univers sur YouTube autour des différentes personnes que j’ai suivi et que je suis aujourd’hui. YouTube ça a été pour moi un point d’encrage, un refuge, c’était mon univers à moi, que je pouvais composer comme bon me semblait, avec des personnes qui me faisait m’y sentir bien. Ça a également été une source inconditionnelle d’apprentissage et de partage. C’est ça qui m’a beaucoup plu, cette possibilité pour chacun de se composer son propre univers. J’ai toujours considéré YouTube comme quelque chose de très personnel : tu peux comparer les feeds de deux personnes et constater à quel point c’est le cas. On obtient des univers multiples.

Je pense avoir commencé les vidéos dans un soucis de partage, dans un besoin de communication car quelque part, je devais me sentir seule avec mes pensées dont la maîtrise m’échappait quelque peu. Lorsque l’on est entouré, il est simple de ne pas trop se préoccuper de sa vie intérieure, on n’y pense pas vraiment en fait. Mais dès lors que l’on est davantage amené à passer du temps seul, que les distractions d’antan ne sont plus là, on prend conscience de l’être qui n’a jamais cessé d’exister à l’intérieur de nous et qui transporte avec lui tout un tas de souffrances et d’incompréhensions. Après avoir quitté mon année de khâgne je me suis retrouvée seule avec moi-même ; ou plutôt, je me suis retrouvée avec moi-même. Et ça, c’est quelque chose que j’avais toujours évité : de rester trop longtemps seule.

J’ai eu envie de partager ça, de créer un espace où l’on pourrait discuter de tout cela, de la vie intérieure humaine, de la nécessité de la prendre en compte et de la comprendre pour aller bien. J’ai commencé à faire des formats d’introspection, des vidéos où je ne savais pas de quoi j’allais parler à l’avance : le but était de laisser les pensées s’extérioriser d’elles-mêmes, à leur rythme. C’est un format que j’ai adoré réaliser et qui m’a beaucoup aidé, aussi parce que je me suis rendue compte,  par tous les témoignages similaires que j’ai reçus par la suite, que mon expérience personnelle prenait parfois une dimension plus universelle.

Au même moment, j’ai commencé les vlogs, et là, j’ai découvert tout un monde, riche de possibilités d’expression d’une envergure autre encore. J’ai pu aller plus loin dans ma volonté de créer un univers où l’on se sentirait bien, en confiance et apaisé.

Quand on regarde tes vidéos, on a souvent le sentiment que tu accordes une place particulièrement importante à l’image, comme un décor. Est-ce que c’est une volonté de ta part ? Quel rôle accordes-tu à cette image ?

Il est vrai que l’image fait partie intégrante de mon contenu. Cela se fait naturellement. Je réalise mes vidéos de manière intuitive, c’est-à-dire que je n’écris pas de script, je ne planifie pas les scènes que je vais filmer, etc. J’emporte ma caméra avec moi, je fais avec l’environnement dont je dispose, je n’ai pas d’images en tête à l’avance ou quoi que ce soit. Tout se fait sur le moment : j’observe avec mon regard et lorsque je me rends compte que quelque chose retient mon attention, qu’un élément me parle : je le capture.

C’est drôle, je repense à une après-midi où mon copain et moi-même sommes allés nous balader dans Paris avec nos caméras respectives. En rentrant à la maison, nous avons regardé nos captures. La différence était assez flagrante, j’en garde un souvenir marqué : nous nous étions baladés ensemble, avions parcouru les mêmes espaces, et pourtant il y avait là deux visions propres de voir le monde. Nous ne nous étions pas du tout attardés sur les mêmes choses, je trouve ça absolument génial. Je crois que ma caméra m’aide à apprendre à me connaître. Mes captures me permettent de me rencontrer en cela qu’elles sont la sélection de mon regard sur le monde. Je prends conscience de ce que j’aime à travers elle (ma caméra).

Tu dédies aussi une grande part de tes vidéos à la discussion, le partage de tes pensées, l’analyse de ton quotidien et de problématiques liées à notre jeunesse (le regard des autres, faire des choix de vie important, vivre en couple). Pourquoi penses-tu que c’est important d’aborder ces thèmes ?

J’ai longtemps évité de rester trop longtemps seule, souvent désemparée par ce que cela provoquait chez moi : le fait d’être confronté à moi-même en fait. Je me revoie dans ma chambre d’internat en hypokhâgne un vendredi soir de début de vacances, complètement déprimée à l’idée de faire une pause de deux semaines. Ce n’est pas que le rythme de la prépa était particulièrement bienfaisant pour moi, au contraire, mais cela avait au moins le mérite de m’occuper de moi-même. J’étais constamment entourée, la journée à la prépa, le soir à l’internat, et j’avais constamment des choses à faire donc l’esprit toujours occupé. Les vacances c’était, pour moi, le vide intersidéral et la perspective de me retrouver seule ne m’enchantaient guère. Bref, on comprend pourquoi à la sortie de la prépa j’étais quelque peu déboussolée, et cette fois-ci, à la fois libérée de toutes ces préoccupations et beaucoup moins entourée (ayant quitté l’internat), je ne me retrouvais plus qu’avec l’essentiel : moi-même. J’allais devoir penser à moi.

Tout cela mêlé aux préoccupations des débuts de la vingtaine : «  comment vais-je devenir une adulte en sachant que je suis un gros bébé ? », « est-ce que je vais réussir à devenir indépendante ? », « comment vais-je gagner de l’argent ? », « qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? », « qu’est-ce que je veux faire de ma vie ? ». Seule. J’étais seule avec tous ces questionnements, mais certainement pas pas la dernière.

C’est pour cela que je partage, parce qu’en réalité, on n’est pas seul là-dedans : on peut mettre des mots dessus à plusieurs, échanger ensemble, s’entre-aider. C’est quelque chose d’extrêmement important pour moi car je pense qu’à travers le partage d’une personne on en apprend beaucoup sur l’universel. Comment ne pas citer Montaigne… « chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition. Les auteurs se communiquent au peuple par quelque marque particulière et étrangère ; moi le premier par mon être universel (…)  Si le monde se plaint de quoi je parle trop de moi, je me plains de quoi il ne pense seulement pas à soi » (Les Essais, Livre III, Chapitre II, Du Repentir »).

En parler, ou l’entendre dans la bouche de quelqu’un d’autre, c’est déjà un soulagement ; ça aide déjà à se considérer plutôt qu’à se discréditer en silence : le silence isole et l’isolement discrédite. Mais la vérité c’est que si à un moment tu ressens quelque chose, quoi que ce soit, agréable, pas agréable, reconnu, pas reconnu, il y a de fortes chances que tu ne sois pas le ou la seule à le ressentir. Parlons-en ensemble alors ! Il y aura toujours une personne qui se reconnaîtra dans nos propos : parler du singulier permet de toucher à l’universel. J’ai envie de dire : « We are all in this together » !

Dernièrement tu as publié une vidéo qui s’appelle « Pimpons la vie » où tu décides de montrer un peu le « backstage » d’une vidéo en ne gardant notamment que les plans de coupe que tu serais sensée supprimer au montage. Tu abordes ton désir de montrer la vie comme mise en scène pour l’embellir. Est-ce que tu pourrais développer ce point et partager davantage ta vision sur cet aspect ? Après tout pourquoi ce serait important de prendre le temps de montrer que tout cela n’est qu’une mise en scène ?

Je ne dirai pas que j’ai un désir particulier de montrer la vie comme une mise en scène dans le but de l’embellir. En revanche, je suis animée par l’idée de créer, comme ça, un univers parallèle qui correspondrait à la sélection de mon regard sur le monde ; non pas dans un but d’embellissement, mais plutôt, peut-être, dans l’idée de capturer ce qui me parle dans ce monde, d’assembler les différents éléments sur lesquels je porte mon regard dans mon environnement, comme pour créer une bulle. En fait, je propose ma manière de voir le monde à un moment T, c’est peut-être aussi simple que ça.

C’est ce que j’aime dans la vidéo, et c’est la raison pour laquelle je pense qu’il n’y aura jamais assez de vidéastes quelque part : on a tout un chacun notre propre manière de visualiser le monde, notre regard constitue une sélection, le voir en vidéo permet de se mettre dans les yeux de quelqu’un d’autre, et ça, ça me parle vraiment.

Je ne suis pas certaine qu’il y ait un but particulier derrière tout cela. Par contre, je sais qu’au cours de cette vidéo ce que je souhaitais montrer, c’est que tout extrait filmé puis monté, constitue une mise en scène en tant que son contenu a été sélectionné par le biais d’une caméra, et qu’il a ensuite été travaillé, façonné, voire même « esthétisé » à l’étape du montage vidéo.

Il y a, tout autour des extraits, le moment où la personne positionne sa caméra, où elle appuie sur le bouton « filmer », où elle se place dans le cadre : c’est tout un vécu de l’image autre que celui du spectateur, un vécu dont on n’extrait proprement qu’une partie. La vidéo que l’on finit par voir sur YouTube ne correspond pas à ce que la personne a vécu : ce n’est la réalité pour personne. Le résultat que l’on obtient, c’est un produit fini, une création, et ce autant pour le spectateur que pour la personne qui a réalisé la vidéo.

Pourrais-tu me parler de ton rapport à l’art en général ? Quelle place occupe-t-il dans ta vie, pourquoi y es-tu sensible, que permet-il ?

À mon avis rien n’est plus précieux que l’art. Je ne sais pas… c’est un tel trésor. L’art me fait vibrer, l’art me provoque des états de transe je dirai même haha ! À mes yeux, nous sommes tous des artistes et l’art nous permet de nous réaliser, de sortir quelque chose de nous, de puiser en nous-mêmes pour mettre au monde quelque chose d’unique.

L’art me fascine, il me donne envie d’être en vie, de danser, de célébrer la vie, de tout lâcher pour ne faire sortir que l’essentiel. L’art m’emporte, l’art me porte. Il me semble que tout est possible avec l’art, il n’y a pas de limites. C’est peut-être cela qui m’inspire autant là-dedans : cet espoir. L’art est un endroit bien à part, peut-être jamais complètement débarrassé des préoccupations quotidiennes, mais il en libère, un temps.

Qui sont tes artistes favoris ?

Il y en a tellement, d’autant plus que je suis très sensible à la musique… voici un échantillon de partages :

  •          Marc Chagall,
  •          Rêveries de Claude Debussy
  •          Lunar Rhapsody de Dr. Samuel J. Hoffman
  •          ‘Tis Autumn de Nat King Cole
  •          Doesn’t matter (voleur de Soleil) de Christine and the Queens
  •          Feu ! Chatterton
  •          Gus Dapperton
  •          This Must Be The Place des Talking Heads
  •          Casimir Pulaski Day de Sufjan Stevens
  •          La BO de LaLa Land
  •          Lazarus de David Bowie
  •          L’album Mon frère de Maxime Le Forestier

J’ai vu que tu faisais aussi de la peinture ? Est-ce que tu peux parler davantage de ton rapport à cet autre moyen de création ? Est-ce que cela te permet d’exprimer une part spéciale de toi, qu’est-ce que cela t’apporte ?

La peinture occupe une place assez importante dans mon cœur. C’est assez intriguant d’ailleurs, il y a quelque chose de très magique avec la peinture… que je ne retrouve nulle part ailleurs.

Je dirai que la peinture touche à quelque chose de bien précis chez moi, qui ne peut être apprivoisé que par elle. J’ai besoin d’être seule pour peindre, c’est un moyen d’expression très personnel.

Pourquoi c’est important de dire qu’il faut danser la vie ? S’en amuser ? Lui donner un caractère même dans les plus petits instants ?

Parce que c’est libérateur, de tout lâcher pour un temps et de célébrer le fait d’être en vie. Simplement. Ces moments d’éveil me parviennent toujours sans même que je les soupçonne de poser un pied dans ma conscience : ce sont comme des instants de grâce où tout me paraît être léger et évident : je ne ressens plus que l’amour.

Ces expériences me font penser au Mémorial de Pascal. C’est un écrit assez marquant, il serait le résultat d’une expérience mystique que Pascal aurait vécu une nuit de 1654. Je pense notamment à un extrait : « Certitude. Certitude. Sentiment. Joie. Paix. ».

De mon côté rien de mystique, simplement, le débit, le caractère décousu de ses phrases, la puissance qui s’en dégage, ne font qu’écho à des moments d’éveils que j’ai vécus. Ce sont des moments où je me sens purement et simplement saisie par l’évidence de ce que l’amour représente dans le monde. Je ne ressens plus que l’amour et je ne suis plus que pour l’envie de respirer cette joie de vivre.

C’est cette légèreté là que je souhaite partager, car elle est à la base de tout. Il suffit parfois seulement de lâcher prise et de souffler pour se rendre compte qu’elle a toujours été là et qu’elle ne nous quittera jamais.

***

J’espère sincèrement que cet article vous aura plu. Personnellement, j’ai beaucoup apprécié le regarde de Lana et son envie de nous transmettre toutes ces émotions qui semblent l’envahir lorsqu’elle se confie à mes questions. Encore un grand merci à elle !

Si vous souhaitez suivre son travail, vous trouverez sa chaîne Youtube en cliquant ici et son compte Instagram juste ici ! Quant à nous, on se retrouve très vite pour un prochain article !

Bises bises.

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